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N'en jetez plus.
3 novembre 2009

Dans la salle d'attente de la vraie vie.

Tu es passé me serrer dans tes bras samedi matin, deux heures avant que ma mère ne vienne me chercher, et avant de repartir pour la Sablière, j'étais moche et je puais parce que je venais d'aller courir, et j'avais les cheveux sales, sans raison valable, mais tu as quand même trouvé que j'étais belle comme un elfe, parce que tu n'as pas vraiment les yeux tout à fait en face des trous, quand tu me regardes, je crois. Ou alors c'est à cause de ta tache de sang à la surface de l'œil qui donne par sa teinte marronnasse un aspect intéressant aux choses qui n'en ont pas tellement, je ne sais plus à quoi c'est dû, tu m'avais expliqué mais je n'ai pas retenu, peut-être que je te regardais au lieu de t'écouter, si cela se trouve, je suis un peu fatiguée, j'ai du mal à retenir les choses en ce moment, j'ai une mémoire sélective, je crois que je me souviens de ce qui est joli, les dents du bonheur s'appellent un diastème, en vrai, et les taches de rousseur, des éphélides, c'est facile de graver des mots pareils dans son cerveau, c'est mutin, c'est frais, c'est poétique, tant le fond que la forme, alors que ta tache sur l'œil, elle me fait de la peine quand j'y pense, cela m'attriste que tu ne voies pas les choses comme tout le monde, que tu ne les voies pas comme moi, déjà que je suis un peu daltonienne j'ai l'impression... Et synesthète, mais de moins en moins, parce que tout mon système dort un peu, c'est l'hibernation après la sollicitation excessive.
Tu me manques, tu me manques et j'ai froid, alors que c'est toi dont la chaudière est coupée dans la grande maison où j'aimerais habiter avec toi comme tu me l'as proposé, mais sans tes parents, parce que si ton père ressemble un peu à Sean Connery, ta mère est trop tentaculaire, mais c'est une autre histoire, j'ai le cœur gelé et le corps avec parce que tu es loin de l'un et de l'autre, et les horloges se jouent de moi, je pense, elles me font croire que le temps se fige dès que je quitte la trotteuse du regard, mais pourtant j'en fais des choses, en ton absence, malgré tout et l'air de rien, malgré rien et l'air de tout, ces trois derniers jours dont un de contretemps déjà écoulé plus un autre à venir, j'ai regardé la pluie par la fenêtre sans aller dessous parce qu'à quoi bon se faire saucer toute seule si l'on n'a pas envie de danser et de rire, j'ai regardé les glaces dans le congélateur sans en manger parce que j'étais déjà assez frigorifiée comme cela et que j'avais un petit peu envie de me punir sans trop savoir pourquoi, je n'ai pas cherché, j'ai eu du mal à m'endormir avant le petit matin alors que quand j'aurais voulu profiter de longues soirées avec toi je tombais raide de fatigue et emportée par le sommeil à 22h30, totalement terrassée, j'ai pesté contre ma mère qui, pendant ce temps, pestait contre moi, j'ai eu envie de fêter Halloween alors que je passais la soirée banalement chez moi pendant que l'évènement passait complètement inaperçu, j'ai fait des cauchemars dégueulasses dans un lit une place surélevé, je me suis levée à pas d'heure, j'ai sauvé Stitch du supplice du tambour, de la machine à laver bien sûr, j'ai laissé mon petit moral se faire un peu plus tirer vers le bas par les anciens de ma famille à qui j'ai bigophoné pour la forme, j'ai fait le compte des manques à gagner, j'ai eu envie d'aller m'asseoir dans un coin avec la tête entre les mains en me balançant d'avant en arrière comme une autiste mais je n'en ai pas tout à fait eu l'énergie, je me suis lamentée un petit peu mais pas trop, j'ai eu envie d'écrire et j'ai renoncé, j'ai eu envie de dessiner et j'ai laissé tomber, j'ai eu envie de réfléchir et j'ai oublié pourquoi alors j'ai débranché mon cerveau et je l'ai posé sur la table pour la nuit, il a un peu pris la poussière, c'est normal, j'ai fait d'autres rêves encore pires, j'ai eu peur d'être enceinte bien que ce soit techniquement impossible, a priori, j'ai eu des regrets, j'ai eu des remords, je suis passée à deux doigts de la jupe de mes rêves qui aurait agi un petit peu comme un déguisement magique et m'aurait donné le courage de panser mes failles en me faisant croire que je pouvais être belle et forte comme Barbarella, Xena, Lara Croft, Wonder Woman et j'en passe et des pas mûres, tout cela parce que c'est la matrice et que les vendeurs ne l'ont pas mise de côté comme ils l'avaient dit, j'ai été dépitée, découragée, attristée, déprimée, enragée, dégoûtée, j'ai vite expédié en un après-midi une large palette de sentiments négatifs, je n'ai plus su à quoi m'en tenir à cause de tes demi-devinettes mon amour, j'ai pleuré et me sont revenus de plein fouet tous les trucs que j'arrivais à faire passer au second plan en me caressant les neurones du leitmotiv délicieusement futile de la parure de simili cuir que j'allais pouvoir revêtir bientôt pour me sentir toute puissante pour une fois, et donner l'impression, à moi en premier lieu, en fait, d'un chouïa de confiance en moi, et avec la disparition subite du petit plaisir dont je me gratifiais d'avance, sont réapparus d'un bloc les angoisses, les rancœurs, les détresses, les sanglots, je me suis sentie stupide, tu me manquais, tu me manques, j'ai voulu faire attention à ce que je mangeais, et au dessert j'ai craqué et j'ai englouti une crème façon banana split, quatre gros carrés de chocolat noir dessert avec des amandes, des noisettes, des raisins secs et des noix de cajou, et un Duplo, et j'avais le cœur au bord des lèvres, au lieu d'y avoir les tiennes en miroir acollé, et je m'en voulais d'être un si piètre modèle de volonté, et j'avais toujours aussi faim, et envie de boire, et de fumer, toute une bouteille, tout un paquet, de me mettre la tête en vrac et d'oublier les tracas, parce que j'en avais encore plus marre que d'habitude de devoir toujours lutter, toujours me battre, toujours fournir tant d'efforts pour ne pas être si forte que cela, pourtant. J'ai discuté avec mon ex, ou plutôt c'est lui qui a discuté avec moi, ou qui a brassé de l'air à vrai dire, il est venu m'accoster virtuellement après des mois de silence en me disant qu'il avait l'air super cool mon copain, eh oui, il a dit que tu avais l'air d'être un bon vivant, et quelque part c'est presque aussi vrai que s'il avait dit qu'il était un homme à femmes, je me suis demandé ce qui m'avait plu en lui, je me suis demandé ce qui t'avait plu en elle, et puis en elle, aussi, après, je me suis demandé d'autres trucs mais il me semble que j'ai oublié quoi entre temps, je suis un petit peu diminuée, ou alors c'est que je n'essaye pas, ou que je suis déconcentrée, c'est le manque d'endorphines dans le sang, j'ai les phéromones inutiles, l'érotisme qui roupille, et l'excuse facile, j'ai hâte que tu me réveilles, j'ai parlé toute seule
en imaginant vaguement que tu m'entendais parce que c'était toujours moins trahir mon envie de te parler à toi que de parler à quelqu'un d'autre qui n'aurait rien eu à voir avec ta personne avec un arrière-goût amer de pourquoi faire, je me suis fait sonner les cloches par une postière désagréable, je me suis fait rabrouer par mon reflet, ou alors c'est l'inverse, les cheveux le teint les yeux le corps j'ai tout haï et j'en ai eu marre de me regarder, je suis revenue bredouille d'une virée shopping compensatoire, j'ai recouvert le carrelage de 250 grammes de Chocapic en attrapant la boîte à l'envers, et, statufiée, j'ai dû attendre que tout le contenu de ladite boîte finisse de se déverser sur le sol dans un cliquetis dramatique avant d'entreprendre de réparer ma maladresse, alors j'ai tout ramassé à la va comme je te pousse, et j'en ai mangé la moitié, ou pas loin, en triant les cheveux, les tiens surtout, et les miens, un peu, aussi, et les miettes et les saloperies indéterminées qui se trouvaient dedans, forcément, avec la moitié d'un pot de yaourt au café supra calorique et format ogre adolescent, après une sage salade verte et un cordon bleu choisi exprès pour son faible taux lipidique, c'était bien la peine, ouais, je sais, après j'avais encore envie de vomir, comme à peu près toute la journée depuis quelques jours à cause de la mauvaise accommodation à mon putain de médicament et puis de la sale idée fixe hypocondriaque que je me fais et que je me ferai probablement toujours d'être enceinte, dans un coin de ma caboche d'âne bâté, et puis j'avais toujours faim, alors j'ai mangé la peau du tiers de mes doigts, autour des ongles, toi c'est les ongles, et moi les doigts, partage des tares, j'ai la chair à vif et des bouts de sparadrap autour qui m'irritent un peu et qui poissent déjà sur mon vernis doré qui s'écaille, ce n'est pas pratique pour taper, pour écrire, ce n'est pratique pour rien, un peu comme tout est beaucoup plus difficile quand tu es loin, un peu comme ton absence est un lourd handicap pour moi, et de plus en plus, qui anesthésie mes capacités physiques et mentales, tu vois, je me sens vite persécutée quand tu n'es pas là pour me ramasser, tu vois, je ne fais rien que des bêtises, des bêtises quand tu n'es pas là, tu m'as rappelé tout à l'heure qu'aujourd'hui, cela faisait tout pile trois mois que l'on se connaissait, tu accordes beaucoup plus d'importance aux dates que moi, ou alors ce sont tes souvenirs qui sont plus performants et mathématiques, je ne sais pas, j'ai envie d'écrire et je n'ai pas le courage, pas la solidité nécessaire pour me confronter à la forte probabilité de ne produire que de la merde ce soir, pas l'aplomb suffisant pour me permettre de tâtonner sans me casser la figure, alors que le seul échec assuré est celui dû au fait de ne pas avoir essayé, mais ce soir, sans toi, j'ai décidé de ne rien faire, j'ai pris l'initiative d'être inactive, reviens-moi très vite et renfloue-moi, chasse le doute et la tristesse qui m'accablent si facilement quand tu m'échappes, gratte simplement à la porte comme à ton habitude et mon mur des lamentations se fera aussi caduc que les feuilles d'automne, que mes défenses, que nos manteaux, plus douce sera la chute, oh pourvu qu'elle le soit, j'ai tellement de choses à te dire, mais qui pourront tout de même attendre un peu, si comme je le prévois tu le veux bien...

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Commentaires
D
Ne t'en fais pas, moi aussi le flot m'a emportée, j'ai volontairement dramatisé le ton pour me moquer un peu de moi, merci beaucoup !
G
Ouah, à quoi nous réduit l'amour. Je ne pensais pas tout lire, mais le flot m'a emportée!<br /> Si tu déprimes trop, i'm here too.
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