Jusqu'ici, tout ne va pas bien, amen quand même.

I feel like a blind man with a color TV. /// Je me sens comme un sac sans poignée dont la bandoulière aurait lâché. /// Les gens qui épellent tout leur nom de famille lettre par lettre au téléphone en citant des prénoms me font mourir de rire, Bertholin, B comme Bernard, E comme Edwige, R comme Raoul, T comme Thomas, H comme Henri etc. /// L'autre jour, un qui commence déjà à remonter un petit peu dans le temps maintenant, dans un magasin, je me suis dit "Tiens elle est jolie cette fille en face de moi", avant de me rendre compte que j'étais devant un miroir, placé relativement loin de moi, au bout d'un rayonnage ; l'on se sent positivement stupide, mais malgré tout, cela fait plaisir. /// J'ai la tête en skaï, les cheveux qui poussent à l'intérieur. /// Si tu as faim, mange ta main et garde l'autre pour demain ; toute mon enfance j'ai entendu ce refrain réflexe, que personne d'autre ne semble d'ailleurs connaître, allez me reprocher de me boulotter les doigts maintenant... /// Je suis fatiguée, épuisée, vidée, vannée, déphasée, et perds le fil de mes pensées, de mes souvenirs, de mes paroles, de mes humeurs, de mes désirs, j'ai besoin de repos, je voudrais dormir, j'ai besoin d'évasion, je voudrais partir. /// J'ai vu la tête de Stephen King pour la première fois de ma vie il y a quelques minutes, je ne m'étais jamais rendu compte que je ne savais pas à quoi il pouvait bien ressembler, et ne m'étais jamais posé la question, bon sang de bonsoir, quelle trogne, je ne sais pas si je vais m'en remettre, à présent je me demande combien de monstres physiques je connais de nom sans connaître de tête... /// Je trouve toujours épatant de voir à quel point les gens ressemblent à leur chien, à moins qu'il ne s'agisse du contraire, si les chiens ressemblent à leur maître, je ne sais pas par quel processus cela se produit : est-ce que les gens sont inconsciemment séduits par un chien à leur image à la base, ou un drôle de mimétisme a-t-il lieu à la longue, une fusion humain chien au fil du temps, et si oui, dans quel sens ? /// Elise Banane Vanille, sans sucre ajouté, rien à jeter, bien agitée, mascara mauve, ongles rouille orange. /// Mon ami reptile qui te faufiles dans mon esprit qu'insinues-tu, sensuellement sournois, sentiments pointus ? /// (J'aime les escarpins élégants et à bouts pointus, et pareil pour les hommes.) /// Nous avons parlé pendant des heures, et pourtant nous n'avons pas dit grand-chose. Le silence ponctuait nos paroles, il y avait de l'espace entre les phrases, le temps ne pressait pas, cela laissait la place pour entendre les mots, l'occasion de laisser résonner les idées. /// Si j'étais une princesse je voudrais épouser un dinosaure, c'est quand même plus sexy qu'un prince. /// En cartonnant le contenu de mon ancien appartement, dans le premier tiroir d'un petit meuble en plastique, j'ai retrouvé, sans l'avoir perdue d'ailleurs, l'enveloppe en papier contenant une petite partie des cendres de mon grand-père, obtenues en douce grâce à un employé compréhensif. J'ai pu y lire la date de la crémation, ainsi que l'heure, 12h36. Quelle idée, cet horaire précis comme un départ de train, alors que plus rien ne pressait... Si ? /// Cela me perturbe quand l'on me dit que j'ai changé, et tout autant quand l'on s'exclame que je ne change pas... Je ne sais pas ce qui m'inquiète le plus. /// Il y a sans nul doute un bon nombre de fois où j'ai eu tort, mais toutes les fois où j'ai eu raison m'empêchent de le reconnaître avec certitude. /// La vie est un amoncellement de renoncements. /// Je voudrais vivre d'autres existences que la mienne. /// "Keuaaa, t'as pas pris de jour de congé pour le mariage de Will et Kate ???" "Euh, bah, non, j'étais pas invitée..." Je me demande si ce sont les mêmes personnes qui posent un jour de congés pour les mariages princiers retransmis télévisuellement et pour l'ouverture des soldes. Je vous vois d'ici trouver que ma question a un petit aspect rhétorique, tout tout petit. /// Constatation en direct : le correcteur orthographique ne connaît pas l'adverbe "sensuellement", il me propose "sensuelle ment". Encore et toujours l'éternelle dénonciation de la femme, pécheresse, trompeuse, incitation à la faute, triple tss et langue de vipère qui sursaute.

Comments

[Nieukette]

Je suis diplômée depuis plusieurs mois et je n'ai pas osé chercher de travail dans la branche encore... Si je travaille dans une "banque", ce n'est pas pour rien : pas de responsabilités humaines. Ça a l'air tellement facile en comparaison avec la montagne que je me fais de la psychologie. Mais sans cela, il est effectivement nécessaire de pouvoir se situer et d'avoir traité en grande partie ses problématiques personnelles, ce que je n'ai pas fini de faire. Je trouve ça compliqué de prendre des marques dans une vie d'adulte, alors qu'on me donne une quinzaine d'années lorsque l'on me voit par exemple.
Mais d'un autre côté, la plupart des étudiants de psycho' (et ceux qui font les 5 années) sont des personnes à haute problématique personnelle. A nous d'êtres conscients que nous ne pourrons pas appliquer ce que nous apprenons à nos proches et à nous-même...
"Qui suis-je ?" : quelqu'un capable d'éclairer vos problèmes lorsque vous ne les voyez pas vraiment, plutôt que "conseiller, guider".
En tous cas, cette version là me pose bien moins de cas de conscience.

[Daisy Rondelle]

Moi aussi je me laisse rattraper par la pudeur. L'on crée un blog pour se faire du bien, sans doute, j'imagine, et puis l'on sait un peu qui nous lit, il ne peut plus nous servir complètement de journal intime, à cause de possibilités, ou de quelques identités connues, et en même temps, écrire un "vrai" journal intime, qui ne serait lu par personne, ne motive pas suffisamment à écrire, c'est compliqué de vouloir se montrer sans oser le faire, de réclamer la parole et d'avoir une panne de son... J'aime bien que l'on m'écoute, mais je suis gênée de le faire devant quelqu'un qui est là pour cela, qu'il soit psy, ou curé, je suis sûre que dans un confessionnal je serais muette... (Pas nécessairement par manque de matière, peut-être par crainte, emballée par la dynamique, de ne plus jamais me taire ? Sourire niais.)

Cela te fait du bien, l'"auto-psy", si je puis dire ? J'étais dans le domaine, et j'ai flippé de ne pas être en mesure d'aider les autres si je n'étais déjà pas en mesure de me secourir moi-même, peur de me sentir illégitime, du genre "Qui serais-je pour revendiquer être capable de conseiller et guider quelqu'un, alors que je suis déjà si peu équilibrée ?"...

[Nieukette]

Les collégiennes me dépassent de plus de deux bonnets... Ça me choque, surtout les collégiennes parisiennes qui sortent des cours pour filer faire les boutiques. Moi je rentrais chez moi, sac à dos Tann's sur le dos, prête à m'écrouler dans le bus sous le poids du sac.
Mes souvenirs d'adolescente scolarisée ne sont pas mauvais, j'étais juste en décalage avec ces gens, j'avais du mal à comprendre leur désinvolture, j'en avais marre des remarques sur mon physique mais j'avais moi même du mal avec cette maigrichonittude.
Pourtant, il y a deux semaines j'ai appris qu'une des filles populaires du collège (qui était accessoirement ma cousine) allait rudement mal en dedans et que tout ça c'était en fait du chiqué..
J'avais donc raison depuis le début !

Je suis, sur le papier, psychologue de l'enfant et de l'adolescent. Je suis, dans ma vie, psychologue de moi-même alors puisque j'ai oublié d'adultiser...

(Mon blog s'est fait délaisser pour cause de travail trouvé dans une banque. Il est censé être mon exutoire mais ma pudeur a repris le dessus et risque de me ronger à nouveau, c'est bête !)

[Daisy Rondelle]

J'espère que ce n'est pas le poème qui a créé l'expression, parce qu'elle n'est tout de même pas au summum de la poésie et de l'inspiration soufflée par les dieux... Imagine avec "Pète un coup, ça ira mieux"... Délire ambulatoire deuxième, decrescendo, le délire du matin serait-il plus embrumé que celui du soir, ou c'est juste parce que c'est moi ?
Je me sens toujours comme une lycéenne aussi, j'ai l'imagerie de l'adolescence ancrée en moi, j'ai de très mauvais souvenirs scolaires, je n'ai pas été la personne populaire que j'aurais plus ou moins rêvé d'être secrètement, pendant que j'y étais j'aurais tout donné pour me barrer, et maintenant je sais que j'en ai peu profité, enfin, j'en avais déjà conscience sur le moment je crois... J'ai toujours un train de retard ou d'avance, je ne sais pas "cueillir le jour". Autre débat. Les lycéens sont tous plus jeunes que moi, ils me dépassent d'une tête et les filles de deux bonnets, je serai une vieille bique que je me sentirai toujours une scolaire... Il faut que je retourne sur ton blog au fait.

[Nieukette]

Le commentaire est succinct, la tête n'étant pas suffisamment dés-embrumée, mais "mange une main et garde l'autre pour demain" je ne l'ai entendu qu'il n'y a qu'une dizaine d'années au lycée ("qu'il n'y a qu'une" ?!), lors de la semaine des poètes me semble t-il, et c'était l'espèce de "chute" du poème. Je me demande si le poème a été rédigé après l'invention de l'expression ou si son auteur en est la cause. Maintenant je me demande comment je peux dire que le lycée remonte déjà à une dizaine d'années alors que je me délecte toujours autant à observer les lycéens et leur microcosme. Bonjour délire déambulatoire de l'esprit, fin du commentaire.